Le roman des années 30 Durant l'entre-deux-guerres, les romanciers français, dans leur grande majorité, restent fidèles à la tradition. C'est l'époque où, dans la lignée de Balzac et de Zola, et sous l'influence plus directe de Romain Rolland, se multiplient les "romans-fleuves" ou "romans-cycles", qui déroulent leurs immenses fresques psychologiques et sociales; les "Thibault" (10 vol., 1922-1940), de Roger Martin du Gard (1880-1958), la "Chronique des Pasquier" (10 vol., 1933-1944), de Georges Duhamel, "les Hommes de bonne volonté" (27 vol., 1932-1946), de Jules Romains (1885-1972), imposante mise en oeuvre de l'unanimisme, que ces deux derniers avaient fondé ensemble en 1906. A côté de ces grands massifs, les voies que suit le roman sont multiples. Tandis que l'on assiste à une véritable dissolution des catégories esthétiques, le roman revêt les formes les plus diverses, prenant pour thèmes l'amour et la saveur de vivre avec Colette (1873-1954), le sens du terroir chez le Vaudois Ramuz (1878-1947) ou Giono le Provençal (1895-1970); chez François Mauriac (1885-1970), l'évocation des forêts des Landes sert de cadre à l'exploration des âmes aux prises avec le péché (Thérèse Desqueyroux, 1927, Les Anges noirs, 1936); chez Bernanos (1888-1948), le romancier devient un catholique militant aux accents prophétiques (Sous le soleil de Satan, 1926; Journal d'un curé de campagne, 1936), tandis que Julien Green (né en 1900) poursuit sa quête de l'homme intérieur (Léviathan, 1929; Minuit, 1936). Solitaire et inclassable, Louis-Ferdinand Céline (1894-1961) retrace, dans une langue brutale, parfois désarticulée, les étapes de son expérience (Voyage au bout de la nuit, 1932; Mort à crédit, 1936), avant de se faire le champion de l'antisémitisme dans des pamphlets qui font scandale. Parallélement, c'est une éthique de l'héroisme qui cherchent à édifier des romanciers plus jeunes: l'aviateur Saint-Exupéry (1900-1944), poète de l'énergie (Vol de nuit, 1931; Terre des hommes, 1939); Henry de Montherlant (1896-1972), aristocrate désabusé qui s'affirmera plus complètement au théâtre; André Malraux (né en 1901), écrivain au style souvent prestigieux, engagé dans des tragédies de son temps qu'il exprime à travers une brève carrière romanesque (Les Conquérants, 1928; La Condition humaine, 1933; L'Espoir, 1937), avant de devenir compagnon fidèle et ministre du général de Gaulle, dont il évoquera notamment la haute stature dans ses "Antimémoires" (1967) et "Les Chênes qu'on abat" (1971). |
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